De Paris à Bamako : le Vélib’, ce troublant objet du désir ! (par Joris Karl)
En mission commando pour vous, chers lecteurs de Boulevard Voltaire, j’ai testé le Vélib’ à Paris. Bon Dieu, que c’est risqué ! Et désagréable. Risqué parce qu’on
est frôlé toutes les 5 secondes par des bagnoles rageuses ; désagréable parce qu’il faut s’arrêter tous les 50 mètres à un feu. J’ai à peine eu le temps de m’arrêter boire une Suze à l’Hôtel
du Nord. Mais bon, le Vélib’ a ses adorateurs, et pas forcément là où on les attend.
Ce symbole de la post-modernité, aussi culte pour le bobo qu’une statuette de bouddha « Maison du monde », est en effet devenu l’amour fou de nos « jeunes » de banlieue ! Cette semaine, Libération a osé affronter le grand tabou du début de siècle : l’explosion des vols de Vélib’ dans la région parisienne. Le journal précise que « l’ampleur du phénomène a forcé la mairie de Paris à communiquer pour répondre à la colère des usagers ».
Il suffit d’aller voir sur le site Vélib’ de la mairie de Paris : l’an passé, « 9.000 vélos volés ou vandalisés ont été comptabilisés » par les services municipaux. «Le phénomène est très concentré sur le nord-est parisien et les communes avoisinantes. À l’heure actuelle, une vingtaine de stations de cette zone a été fermée «jusqu’à nouvel ordre». » Il y a trois ans déjà, la société JCDecaux (prestataire) avait négocié avec la ville de Paris un avenant sur le contrat pour faire face au vandalisme : plus de 16.000 bicyclettes avaient été dégradées en 2009 sur un parc de 23.000 vélos !
Actuellement, la palme revient peut-être à Aubervilliers, et son parc de 500 Vélib’,
où… 1.000 Vélib’ ont été volés ou vandalisés depuis le début 2013.
Comment expliquer ce phénomène quasi paranormal ? C’est là que nos chasseurs de fantômes sociaux interviennent : pour Christophe Crépin du syndicat UNSA Police, « ces jeunes sont désœuvrés. Ils n’ont pas l’impression de voler quelqu’un mais juste de s’en prendre à l’État.» Quant à la déclaration de la mairie d’Aubervilliers, elle vaut son pesant de cacahuètes : « Dans les quartiers, c’est un peu devenu un rite initiatique, un symbole de virilité pour les 13-16 ans que de voler un Vélib’. Après, il y a aussi le fait que le service a longtemps été perçu comme un élément allogène sur « leur » territoire, une pratique issue de la culture bobo. Qu’ils se sont réappropriée de manière délictueuse.»
En province, en tout cas, on ne se décourage
pas. À Toulouse, dont… 75 % du parc Vélib’ est vandalisé chaque année, la municipalité veut « étendre son système aux quartiers sensibles, comme La Reynerie et Le Mirail ». Bon
courage !
Restons positif. Le Vélib’, dont on voit paraît-il des exemplaires jusqu’à Bamako, fait des heureux. Comme disait un haut responsable de JCDecaux cité par Le Figaro, « les Africains adorent le côté 4×4 du Vélib’, si robuste qu’il permet de circuler même en brousse ». Roulez, jeunesse !
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