Xi Jinping, dehors !
La visite de Xi-Jinping sur la Côte d’Azur le week-end dernier a été à l’image de ce que la Chine est prête à offrir à la France : un grand lot d’emmerdements sans contrepartie. Car cette visite ressemble fort à une histoire de Coluche : C’est l’histoire d’un dirigeant chinois qui loge au Negresco, mais qui amène avec lui son lit et peut-être même son stock de nems… Et, pendant que Monsieur roupille ou prend le soleil, la Promenade des Anglais est fermée, l’unique autoroute est réduite à une seule voie avec, au péage d’Antibes, près de 40 gendarmes armés jusqu’aux dents et contrôlant, voiture par voiture, les 20 kilomètres de bouchons qu’ils ont créés, la ville de Nice et les accès à l’aéroport et aux communes alentours sont entièrement saturés. Des milliers de personnes, dont l’auteur de ces lignes, sont bloquées dans leur voiture pendant des heures, alors que leur trajet prend habituellement à peine 20mn. En résumé, un grand projet international qui, au niveau local, n’apporte que des inconvénients…
De quoi parlent les médias mainstream pendant ce temps ? Du dîner de ce nouveau Timonier 5G et d’Emmanuel Macron – le génial organisateur de cette virée dans le sud – au sein de la villa Kerylos, à Beaulieu. En un mot : De la com’. De la com’ pour ce qui n’est en réalité qu’une vaste supercherie destinée à favoriser encore davantage l’emprise de la Chine sur une Europe déboussolée. Une expression du softpower chinois, qui n’a rien à envier à la taqîya islamique, destinée à accroître l’hégémonie de Pékin sur l’ensemble des Capitales de l’U.E., à commencer par celles qui sont les plus attractives économiquement : Berlin, Paris, Rome, Madrid…
Rappelons tout de même que les nouveaux trains de la Route de la soie qui relient Lyon et Lille à la Chine arrivent pleins de marchandises et repartent, dit-on, vides à 80 %. Cette mondialisation débridée, outre la menace qu’elle fait peser sur l’environnement – ce dont les dirigeants chinois se soucient comme d’une guigne – est caractéristique de la conception chinoise du commerce, et à vrai dire de toute relation diplomatique. Si la Chine se définit comme l’Empire du Milieu, ce n’est pas par hasard. Cela dénote un trait de la pensée des dirigeants chinois qui, pendant très longtemps, ont considéré leur pays comme supérieur à tous les autres. Dans les années 90, un réveil s’est produit et les dirigeants communistes ont pris conscience de leur erreur. L’entrée de la Chine dans l’OMC n’avait pas pour objet de satisfaire aux conditions du commerce international. Ce n’était pas un signe d’ouverture à l’Occident. Le but était de participer à la guerre économique qui fait rage sur la planète, afin de reconquérir ce premier rang que la Chine avait cru posséder jusqu’ici, et qu’elle était bien décidée à acquérir désormais, quitte à mener une guerre irrégulière.
Trente ans plus tard, la Chine inonde l’Europe de produits bas de gamme, ne satisfaisant à aucune règle éthique, sociale, environnementale digne de ce nom. En retour – et c’est la raison pour laquelle les entreprises françaises ne parviennent qu’à exporter peu en Chine, et que les trains de la Route de la soie repartent à vide – elle bloque les produits étrangers à coup de normes et de tracasseries administratives sans fin. Quand la Chine implante une de ses entreprises à l’étranger, la Chine pose ses conditions. Quand un investisseur étranger implante une entreprise en Chine, la Chine pose ses conditions. En attirant les occidentaux grâce à des coûts de production hyper concurrentiels, et donc en produisant une part de plus en plus grande de nos biens manufacturés, depuis les pièces de moteur d’Airbus A350 jusqu’aux produits agroalimentaires les plus élémentaires tels que le cornichon, la Chine aspire notre savoir-faire, se développe, et créé une dépendance unilatérale nocive. Pour le dire simplement : la Chine, et plus largement l’Asie, est en train de nous faire crever. Et quand nous serons moribonds, ce qui ne saurait tarder, elle nous rachètera, ce qu’elle a déjà commencé à faire largement – les chinois ayant racheté des milliers d’hectare de terres agricoles dans le Berry, plus de 150 châteaux français, des centres de vacances comme le Club Med, dans des groupes hôteliers, etc. Un étudiant chinois à l’université Paris I Sorbonne confiait un jour à l’auteur de ces lignes : « Vous devez apprendre à vous protéger, sinon on va vous bouffer. »

La mondialisation libérale est responsable de ce phénomène de désappropriation. Tous les pays, et pas seulement la Chine, y participent, ou aspirent à y participer. Or, elle détruit à la fois l’environnement et le processus de civilisation occidental. La France doit suivre les conseils de cet étudiant chinois et apprendre à se protéger. Cependant, les progressistes actuellement au pouvoir ne le souhaitent pas. Ils sont férus de libéralisme économique, et n’imaginent pas un instant qu’il soit possible ni même souhaitable de sortir de ce modèle. Ce qu’ils souhaitent, c’est réguler les flux, pour corriger les effets pervers d’un marché laissé à lui-même.
Hors le modèle ultra-libéral du « tout marché », il y a donc deux options qui se font face aujourd’hui. La première est celle des néo-libéraux et des sociaux-libéraux, c’est à dire peu ou prou celle de Macron et d’une large partie de la droite française : créer des normes internationales et des organisations supranationales pour réguler la mondialisation. L’autre option est nationaliste et conservatrice : Maintenir une économie libre, mais à une échelle plus réduite. La première option, mise en place il y a déjà plusieurs décennies, a montré son impuissance : la planète est ravagée, et notre civilisation bascule. Keynes disait déjà en 1932 que le capitalisme international était mauvais et qu’il fallait en sortir en revenant – chaque fois que cela est possible – à une échelle nationale, c’est-à-dire à une échelle où le pouvoir politique peut effectivement reprendre la main. Si certains secteurs ont vocation à demeurer internationalisés, d’autres ont vocation à être régionalisés (à l’échelle de l’UE notamment), et d’autres encore à être entièrement nationalisés. Tout ce qui concerne notre alimentation par exemple. Les terres agricoles doivent être protégées ; il est impensable qu’elles puissent être achetée par des individus, voire des consortiums, ne possédant pas la nationalité française.
Notre économie doit être repensée à la lumière des menaces que fait peser la mondialisation sur notre quotidien, et non à la lumière des espoirs qu’elle suscite auprès des idéologues progressistes. Ce n’est plus le développement économique qui devrait guider notre réflexion, mais la stabilité économique de long terme. Notre économie, qui a été pendant un siècle, en théorie du moins, une économie de la croissance et de l’innovation, s’est révélée en pratique une économie de la destruction, une économie ou le poids des externalités négatives dépasse de loin les bénéfices obtenus. Notre économie devrait devenir désormais une économie de la préservation. L’enrichissement indéfini ne peut plus être un objectif de vie, car cet objectif est en rupture avec le principe de préservation de l’environnement et avec celui de notre civilisation. Nous sommes en train de brader notre pays pour générer du capital. Les libéraux le font au profit des plus riches, en espérant que le ruissellement bénéficie aux autres. Les socialistes le font au profit du plus grand nombre. Mais le résultat est le même, la nature, notre santé même, et notre héritage civilisationnel en souffrent. Il est temps de rompre avec ces pratiques. Rompre progressivement et intelligemment, ainsi que Keynes le demandait, c’est-à-dire en renonçant au fameux « grand soir révolutionnaire » qui détruit plus qu’il ne construit. Cette rupture, en matière économique, porte un nom : le conservatisme, qui, en matière économique, a deux objectif de conservation, ou de préservation : l’environnement et la civilisation. Et elle suppose, aussi inconvenant que cela puisse paraître, de mettre Xi Jinping – c’est-à-dire la Chine et son modèle nocif de développement – dehors !
Frédéric Saint Clair
Source : http://valeursactuelles.com
Commenter cet article