Les voyous du rap français (par Gabrielle Cluzel)
Un site internet a réussi à tromper des
policiers au téléphone et à mettre en ligne le casier judiciaire (ou plus exactement la fiche STIC, qui répertorie tous les crimes, délits et infractions constatés, qu’ils aient fait l’objet
d’une condamnation ou non) de rappeurs aussi célèbres que Booba, Rohff, La Fouine, Cortex et Morsay.
C’est dégueulasse. Il ne manquerait plus que la fine fleure du rap français, aussi douce et pure que Chantal Goya, n’ait plus le droit de commettre ses petites forfaitures tranquillement sans que tout le monde soit au courant. La préfecture, on s’en doute, a immédiatement ouvert une enquête (« On prend cette affaire très au sérieux » a-t-elle déclaré) : encore un dysfonctionnement chez les flics dans lequel il va falloir mettre bon ordre.
Enfin, tout cela montre à ceux qui disent que
ces gaillards-là ne font rien d’autre que de cracher sur la France (« Fuck la France », « Je fais des dons d’urine afin que la France entière se
désaltère »), les flics, (« Mais moi j’ai le sourire comme à l’enterrement d’un flic. »), l’Église (« Pas de meilleur endroit pour s’faire sodomiser que
l’église », « J’me lave le pénis à l’eau bénite »), les femmes (« Salopes en string autour de moi, ces putes sont maraboutées », « Ferme
un peu ta gueule, va m’faire un steack frites. Tu m’as fait mal au crâne, j’suis à deux doigts d’te court-circuit’ ».), et Marine Le Pen en particulier, (on va
« l’égorger », on va la « baiser dans des tournantes »), qu’ils sont bien mauvaises langues, car ces messieurs pratiquent aussi tout un tas d’autre petites
activités juteuses et divertissantes, un vrai inventaire à la Prévert : vol avec violence, tentative d’homicide, meurtre, vol à main armée, vol à l’arrachée, trafic de stupéfiants,
rébellion, insulte envers agents de la force publique, etc.
Ce soir, je ne sais pas pourquoi, je pense d’un coup à
nos gentils bobos rêveurs, de Thomas Ravier, rédacteur de la prestigieuse Nouvelle Revue Française, qui voit en Booba un nouveau Céline, un génie littéraire qui aurait même inventé une
figure de style : la « métagore » (la métaphore gore), et qu’il faudrait faire étudier aux lycéens, à l’académicien Jean d’Ormesson qui, sur le plateau de France
2, a consacré le « talent » de Rohff en récitant un extrait de sa chanson Testament, en passant par le très chic Christophe Beaux, Président de la Monnaie de
Paris, une des plus vieilles institutions françaises, qui vient de frapper, en guise d’hommage, une médaille à l’effigie du « Duc de Boulogne » (sic), petit nom pour les
intimes de Booba.
Comme dirait Georges Brassens, « Il y a des coups d’pieds quequ’part qui se perdent ». Et je reste polie.
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