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Le blog politique de Thomas JOLY

Nouveau gouvernement : popote électoraliste, rata républicain, mais risque de dérapage autoritariste

23 Octobre 2018, 06:19am

Publié par Thomas Joly

C'est finalement un gouvernement à son entière dévotion que vient de former Emmanuel Macron, consolidant ainsi son emprise sur la petite coterie qui l'a aidé à accéder au pouvoir. Que cela soit entendu une fois pour toutes et par chacun : le macronisme ne peut être qu'holistique. Les rumeurs de dissension entre le Président de la République qui, dans sa vision paranoïaque de L'État, tenait à s'entourer de fidèles et seulement de fidèles, et son Premier ministre avant tout soucieux de faire entrer au gouvernement de nouveaux juppéistes (Dominique Bussereau, Maël de Calan) ou d’accroître les responsabilités de ses proches (Gérard Darmanin ou Sébastien Lecornu) étaient bien justifiées. Le match, comme nous l’annoncions la semaine dernière, aura tout naturellement – institutions obligent – tourné en faveur d'Emmanuel Macron désormais entouré de sa dernière garde rapprochée élargie aux chevau-légers de François Bayrou, faiseur de roi en 2017 et de baronnets en 2018. Une page supplémentaire de tournée dans le livre de plus en plus moisi de la Ve République, mais certainement pas une page nouvelle, ni pour la France ni pour les Français. Ce gouvernement c’est le changement dans la pire des continuités, celle de la cuisine politicienne réchauffée au petit feu de la marmite électoraliste selon la recette bien connue du rata néo-républicain.

Faire passer les quelques projets de loi encore à venir et préparer les élections européennes et municipales, voilà la grande-minuscule affaire portée par la vision myope de ce Président sépulcral d'une République crépusculaire.

L’allocution télévisuelle d'Emmanuel Macron au soir du remaniement fut, à cet égard, emblématique. Flou, spectral, ânonnant son texte écrit à la façon d'un écolier sous-doué, Macron se voulait grave et solennel. Il ne fut que lugubre.

Deux objectifs donc pour ce nouveau gouvernement :

  • Mettre de l'huile dans les rouages déjà rouillés d'une machine défaillante pour permettre l'adoption des lois qui viennent : celle sur la bioéthique – en particulier la procréation médicale assistée (PMA) sans père, celle sur l’instauration d'un service national universel, et celle sur les retraites. Les nominations et extensions de responsabilités au sein du gouvernement remanié relèvent à cet égard du sur-mesure : le sémillant Franck Riester (venu de la pseudo-droite mais bien plus proche de Bruno Le Maire que d'Édouard Philippe et donc totalement macronisé), par ses amitiés philosophiques et ses orientations amoureuses et par son engagement anti homophobie, sera un élément important pour le camp homo-féministo-progressiste aux côtés de Marlène Schiappa, dans la préparation de la loi PMA, antichambre de la GPA, tandis que le postadolescent et non moins sémillant Gabriel Attal aura pour mission de se consacrer uniquement à l’élaboration de ce fameux service national dont ne veulent ni l’armée, ni les jeunes français qui en savent l'inutilité et en pressentent les risques par eux encourus lorsqu’ils seront confrontés demain, filles et garçons, aux petites racailles des cités. Venus tous les deux du MODEM, Jacqueline Gourault aura pour tâche d'apaiser les élus locaux dont le soutien à la politique de Macron sera monnayé au prix fort, pendant que Marc Fesneau (sémillant lui aussi) dorlotera les parlementaires LREM et centristes.
  • Préparer les élections. Ce sera le rôle de Christophe Castaner. La lutte contre le terrorisme et la délinquance (pour autant que lutte il y ait au sein d'un ministère qui recule à la onzième place dans l'ordre protocolaire) étant confiée au préfet Laurent Nuñez venu de la DGRI (Direction Générale de la Sécurité Intérieure) qui hérite d'un secrétariat d'État mode Pasqua/Pandraud, l'homme à tout faire de Macron aura pour mission essentielle de planifier le terrain politicien pour les quatre prochaines années. Débarrassé de fait, même s'il multiplie les déclarations musclées à la Rodomont pour faire croire le contraire (cf. le JDD du 21 octobre : « J'assume une politique ferme »), du rôle de « flic en chef » auquel son passé ne l'avait certes pas préparé (il fut dans les années 80 un proche de Christian Oraison, caïd de la pègre provençale, formé par Gaëtan Zampa, l'une des figures de la french connection, et abattu de plusieurs balles en 2008), Castaner pourra se consacrer presque entièrement à la préparation du combat contre la « lèpre nationaliste » lors des Européennes, à la préparation des Municipales de 2020, et surtout au redécoupage des circonscriptions législatives qu’imposera la réforme constitutionnelle retardée mais toujours inscrite dans l'agenda élyséen. Presque entièrement… Car il ne pourra échapper à la responsabilité de l'immigration (Castaner versus Salvini et Orban, la partie risque d’être pittoresque) et à l’organisation de l’islam de France (le « DE » disant bien ce qu'est la finalité du projet) voulue par Macron. À cet égard Castaner est, à l’évidence l'homme de la situation, lui qui déclarait sur RMC en nombre 2017 que l'islam était « une religion d'amour et de paix » et qui estimait en mars dernier nécessaire d’accueillir les djihadistes de retour de Syrie. Castaner, on le voit, est pour Macron l'homme qu'il faut à la place qu'il faut.

En ces temps incertains où la moindre étincelle peut mener à une explosion générale, la faiblesse du pouvoir est un crime absolu. Comme tous les caractères faibles, comme tous les êtres troubles et perturbés par leurs propres images, Macron peut à tout moment faire preuve d'autoritarisme. Il le fera si sa survie politique en dépend. Contre ses opposants. Et le cas échéant contre le peuple. Ce gouvernement est conçu pour cela. Le Macronisme n'est pas achevé, quel que soit le sens que l'on prête à ce mot.

Ce dont la France a besoin face à ce système de faiblesse et de couardise qui, à tout instant peut se transformer en totalitarisme de défense régimiste, c'est d'une opposition nationale forte, déterminée et radicale.

Le Parti de la France doit en être à la fois la truelle et le ciment.

Jean-François Touzé - Délégué national aux Études et argumentaire

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