Des meurtres sous le tapis faute de médecins légistes
Morts pas si naturelles, assassinats déguisés en suicides… Des homicides passeraient sous le radar des autorités. En cause : plusieurs failles dans le dispositif de médecine légale. Selon la loi, la dissection est obligatoire en cas de mort violente ou de mort inconnue ou suspecte.La décision de déclencher une autopsie reste le privilège des magistrats.
Tout est parti d’une rumeur persistante dans un petit village de l’Aveyron. Automne 2014, une centenaire rend son dernier souffle dans une maison de retraite de la région. Spontanément, les riverains pensent qu’elle a succombé au grand âge. Après un rapide constat, le médecin dresse un acte de décès dont il indique la cause : « mort naturelle ». Mais deux ans plus tard, le dossier se retrouve sur le bureau d’une juge d’instruction du pôle criminel de Montpellier. Entre-temps, il s’était dit au village que la centenaire avait été empoisonnée par son fils, âgé de 74 ans. Un bruit de fond suffisant pour que les enquêteurs s’y intéressent de plus près. En juin, le fils est passé aux aveux en garde à vue.
Des affaires comme celle-ci, Sophie Gromb, responsable du service de médecine légale au CHU de Bordeaux, pourrait en citer des dizaines. Dans le dernier numéro de la revue Sang-Froid (Ces homicides qui ne disent pas leur nom, été 2016), qui mêle avec brio polar et justice, la médecin légiste tire la sonnette d’alarme. Car elle en est convaincue : en France, des homicides passent sous le tapis faute d’autopsies.
Combien ? Difficile à dire, aucune recherche au niveau national n’ayant été faite sur le sujet.
La réorganisation de la médecine légale a, en effet, entraîné un regroupement des services autour de structures hospitalières régionales. Une mesure à double tranchant pour Sophie Gromb. « En essayant d’améliorer la qualité, on a créé des trous noirs, des zones périphériques où il n’y a plus de médecins légistes« , constate la responsable du service de médecine légale de Bordeaux. [...]
« Une autopsie avec recherche de stupéfiants, alcool et lésions, va facilement chercher dans les 1.000€ », chiffre une procureure. Les frais de transport du corps ne sont pas non plus inclus dans le forfait. Autant de dépenses qui n’incitent pas à faire du zèle.
Source : http://www.fdesouche.com