Sans réserve (par Alain Sanders)
Un petit retour, si vous le permettez, car elle ne passe
pas, sur la déclaration de François Hollande lors de sa visite de porteur de valises en Algérie. Devant ses hôtes FLN, qui n’en demandaient peut-être pas tant, le secrétaire général du PS a
notamment déclaré : « Le fait colonial doit être condamné sans réserve. » Répétons bien : sans réserve.
Rien, que dalle, pas la moindre petite chose, pas le plus infinitésimal détail à sauver ? Non. « Sans réserve », dit-il. Rien à sauver, rien à garder, rien à conserver. Sans réserve !
Même pas la suppression de l’esclavage qui voyait (et quand je dis voyait…) des millions de pauvres Noirs razziés et vendus aux esclavagistes musulmans (dont on ne parle curieusement jamais) ? Non. Sans réserve, dit-il.
Même pas la transformation de la Mitidja, immense marais fétide ou régnaient les fièvres, transformée en une terre nourricière ? Non. Sans réserve, dit-il.
Même pas l’éradication du béri-béri, de la maladie du sommeil, du tracome ? Même pas la lutte contre la malaria et la lèpre ? Non. Sans réserve, dit-il.
Même pas le docteur Schweitzer et
Lambaréné ? Même pas les médecins militaires de la Coloniale admirables de dévouement ? Non. Sans réserve, dit-il.
Même pas les missionnaires et les Sœurs installées dans des brousses perdues pour évangéliser, bien sûr, mais aussi pour installer des écoles, des dispensaires, des maternités ? Non. Sans réserve, dit-il.
Même pas l’irrigation de terres improductives pour en faire de véritables jardins, des champs de sorgho, des vergers ? Non. Sans réserve, dit-il.
Même pas la fraternité d’armes avec les goumiers marocains, les tirailleurs algériens et tunisiens ? Non. Sans réserve, dit-il.
Même pas les arbres fruitiers, les vignes, les pins, les eucalyptus, les haies de rosier, les poivriers, le chèvrefeuille et la mimosa là où rien ne poussait et que le peu qui poussait était boulotté jusqu’aux racines par les chèvres ? Non. Sans réserve, dit-il.
Même pas les exploitations de Wali au
Gabon ? Même pas l’œuvre du médecin-colonel Jamot au Cameroun dans les années trente, qui donnera sa vie pour sauver des milliers de petits négrillons ? Même pas Brazza libérant les
esclaves du Congo (« Ce drapeau tricolore appartient à une nation qui rend libres ceux qui l’habitent. Toi qui as touché ce drapeau, tu es libre ») ? Non. Sans réserve,
dit-il.
Même pas Lyautey, Galliéni, Louis Bertrand, Maurice Le Glay, le général Daumas, l’amiral Courbet, Jean d’Esme ? Non. Sans réserve, dit-il.
Rien à sauver, même symboliquement, de l’œuvre coloniale française en Afrique du Nord, au Sénégal, en Afrique orientale, à Madagascar, en Inde, en Indochine ? N’insistez pas : rien. Sans réserve, dit-il.
Dernièrement, je relisais L’Anthologie coloniale (J. Peysonnet et Cie Editeurs, 1929) de Marius-Ary Leblond. Un gros livre sous-titré : « Pour faire aimer nos colonies ». Et sans réserve ! Ce Hollande, comme le pays du même nom, est vraiment au-dessous du niveau de la mer.
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