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Le blog politique de Thomas JOLY

Jeanne du Barry en ouverture à Cannes : trop libre, pour Konbini !

18 Mai 2023, 09:22am

Publié par Thomas Joly

C'est amusant, tout de même, dans l'art, ces phénomènes de mode. Au cinéma comme en peinture, comme en musique, il y a des cycles. La seule constante, depuis, disons les années 60, la seule injonction, c'est de faire un truc engagé. Ça peut être moche, raté, paresseux, mais il faut que ça véhicule un message. Aujourd'hui, le message, dans le monde du cinéma, c'est « feu sur les hommes ». Retour de balancier, sans doute, après des années de castings scabreux et d'actrices qui couchaient pour réussir. Si l'on veut. Mais, surtout, participation à la curée générale contre un patriarcat plus ou moins fantasmé et des « violences-faites-aux-femmes » souvent difficiles à établir. Toute la Croisette bruisse de la pétition d'Adèle Haenel : ces dames fouleront le tapis rouge en robe fendue et tous bijoux dehors, mais surtout pas pour plaire aux hommes, hein, attention. Salauds !

Maïwenn, elle, a réalisé un beau film (à en juger par la bande-annonce), Jeanne du Barry, dans lequel elle interprète le rôle éponyme, et Johnny Depp Louis XV. Objectivement, c'est une bonne idée d'avoir choisi un acteur cabotin, au visage marqué par l'excès, pour jouer le Bien-Aimé. Elle-même, dans le rôle de cette fille partie de rien, aussi belle qu'intelligente, amoureuse du plaisir et de la vie, semble tout à fait crédible. Oui, mais voilà, Konbini, mètre étalon de la bêtise crasse et de la soumission woke, a décodé le film pour nous. Des « Décodeurs » du Monde aux commentateurs de Konbini, c'est une manie, décidément, de nous dire ce qu'il faut penser. D'abord, l'intrigue, qui montre une femme jouant de ses charmes pour se tailler une place au soleil, serait « puante ». Ben voyons ! Protégée par des hommes plus âgés, multipliant les amants, elle finit par être présentée au roi. Bon. Et si cette vie, que des esprits étroits jugeraient dissolue et ambitieuse, était son choix ? L'auteur de l'article ne s'est pas posé la question. D'ailleurs, cet homme qui écrit pour Konbini, Arthur Cios, n'ayant pas d'utérus, peut-il avoir une opinion sur les femmes ? Quel théorème gauchiste l'emporte, dans ce cas précis ? On ne sait pas. On attend Les Décodeurs.

Plus grave : en 2022, Johnny Depp a été accusé de violences conjugales par son ex-femme, Amber Heard. Il s'est avéré que cette actrice, manipulatrice, ultra-violente elle-même, était loin d'être une oie blanche - mais c'est une femme, donc ce n'est pas pareil, sans doute. C'est ça, la parité : c'est quand les femmes ont toujours raison a priori. Maïwenn, elle, a mis une taloche à Edwy Plenel pour des raisons qui lui appartiennent, et ce dernier a d'ailleurs porté plainte contre elle. Bref, ce film n'est pas seulement nauséabond dans son intrigue, il est également joué par des gens violents. Bon, d'accord. Et à part ça, c'est un bon film ? Du bout des lèvres, Konbini doit bien reconnaître que oui. C'est tout ce que l'on voulait savoir.

L'histoire de Jeanne du Barry commence comme une comédie de Labiche et se termine comme une tragédie de Sophocle. Ses derniers moments (« Encore un moment, monsieur le bourreau ! ») sont bouleversants, tandis que sa légèreté et son goût de la vie sont bien français, pour le meilleur et pour le pire. Contrairement à tant d'anciennes gourgandines, elle n'a jamais joué à la puritaine : comportement dont certaines actrices pourraient utilement s'inspirer. Contrairement à tant de gens du sérail, à la Cour en 1768 comme au cinéma en 2023, elle est arrivée toute seule aux marches du trône parce qu'elle était jeune, belle et brillante. Autant de qualificatifs qu'on peine à trouver chez les pisse-froid du 7e art. Nous attendons avec impatience un nouveau retour de balancier, vers plus de légèreté, moins de dictature et de haine entre les sexes : un retour de l'esprit de galanterie, dans sa double acception de politesse prévenante et de séduction légère. Et bravo Maïwenn !

Arnaud Florac

Source : http://bvoltaire.fr

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