Nicolas Bay, député européen Reconquête, est-il le seul à trouver choquante l'exposition photo qui a lieu dans l'enceinte du Parlement européen ? Probablement pas. Il n'empêche que c'est à lui que l'on doit ce lancement d'alerte, pour le dire avec les mots de l'époque. Ecce homo (1997) est une série de photos d'Elizabeth Ohlson mettant en scène Jésus-Christ présent auprès de personnes marginales. Sur le fond, pourquoi pas. Mais quel est l'intérêt de montrer, sur l'un des clichés, un homme noir dans la position du crucifié, enlacé par un homme blanc ? Y a-t-il une autre justification à ce blasphème objectif que la provocation ? Les spécialistes de l'art contemporain trancheront le débat - à leur manière, c'est-à-dire avec des circonlocutions vaseuses qui éloignent l'art des gens ordinaires.
Pour faire une brève parenthèse culturelle, la récurrence d'œuvres obscènes (dans ce cas précis) ou totalement absurdes participe d'un même décalage entre le geste et l'objet, décalage fondamental que l'on peut dater, pour les plus indulgents ou les plus cérébraux, au Carré noir sur fond blanc de Malevitch (1915). Et pour les plus taquins ou les plus lucides, au scandale provoqué par la Fontaine de Marcel Duchamp (1917). Dans les deux cas, il s'agit d'un geste artistique qui prévaut sur la compréhension que peut en avoir le public. Un œil non éduqué peut admirer objectivement les tableaux de David ou les voiles de marbre de Strazza. Il ne peut, en revanche, pas comprendre objectivement en quoi sont beaux un carré de peinture noire ou un urinoir exposé sur un piédestal. Bref, depuis que l'art a cessé d'être accessible, il faut systématiquement un texte explicatif plus épais que l'œuvre pour que cette dernière soit comprise. Ainsi de cette exposition, ainsi de cette photographie.
Une fois refermée cette parenthèse, une question : y a-t-il un droit au blasphème dans l'art ? Peut-être. Ce n'est pas sûr, contrairement à ce que l'on croit. Car non seulement la fonction première de l'art n'est pas de transgresser, mais surtout, il n'y a plus rien à transgresser, aujourd'hui. Mais admettons, comme dirait Jean-Marie Bigard. Si l'art a le droit de blasphémer, pourquoi ne s'attaque-t-il qu'à la religion chrétienne et, le plus souvent, spécifiquement à la religion catholique? Là, on sèche. Deux pistes : d'abord parce que les catholiques, et plus généralement les chrétiens, n'ont pas vécu la Shoah et ne décapitent pas ceux qui se moquent d'eux. Ce sont les seuls sur qui on peut s'acharner.
Il y aurait bien une autre piste. Si les « artistes » autoproclamés s'attaquent en priorité au christianisme, c'est peut-être (mais c'est là, concédons-le, un point de vue de chrétien) parce que la religion chrétienne est vraie et que la vérité de son message appelle la haine de certains. Un film sur Don Amorth, l'exorciste du Vatican, sort ces jours-ci : c'est encore le film d'un pays protestant et qui accorde pourtant du crédit aux possessions démoniaques et au pouvoir que les prêtres catholiques ont sur le démon. Ils ne se sont pas demandé si cet acharnement contre le catholicisme et cette puissance de la foi contre le diable étaient liés au fait que le catholicisme était la religion véridique. Il faudrait peut-être commencer, face à de telles expositions, à se poser la même question. Ce n'est qu'une suggestion.
Si cette exposition mettait en scène des Juifs, le procès aurait lieu en comparution immédiate. Si elle mettait en scène des musulmans, la tête d'Elizabeth Ohlson serait déjà séparée de son corps. D'ailleurs, on le sait bien, rien de tout ça n'arrivera jamais. Surtout pas au Parlement européen, qui s'attache à détruire les racines chrétiennes du continent qu'il prétend représenter mais promeut le hijab et finance des organisations liées aux Frères musulmans. Philosophiquement parlant, et même métaphysiquement parlant, pour quoi œuvrent ces gens ? Et, surtout, pour qui ?
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