Interdiction de Millésime K : pour le monde de la culture, le rap doit rester une musique de racailles
La gauche croit encore être le camp de la modernité. Cela en devient gênant, à la manière d'une octogénaire en string qui se promènerait au bord d'une plage en se prenant pour Ava Gardner. On ne sait pas bien comment lui dire que c'est fini, maintenant, et qu'il faut rentrer. Voyez la culture, par exemple : la gauche continue à trouver subversif de donner du prix à la laideur. Scotcher des bananes sur un mur : sublime ! Composer de la musique avec des robinets : grandiose ! Ça fait un siècle que le message a remplacé la beauté. On connaît très bien ces nouvelles formes d'art, qui permettent à des profiteurs de spéculer sur des imposteurs. Et pendant ce temps, les veaux paient leur ticket pour aller au musée, s'esbaudir devant des excréments.
Dans cet art dit « mineur » qu'est la chanson (souvenez-vous de l'altercation célèbre entre Serge Gainsbourg et Guy Béart sur ce sujet), c'est pareil. La gauche continue à penser que ses grilles de lecture, qui ont toutes au moins quarante ans, sont opérantes. C'est elle qui explique, ou pense expliquer, à quoi correspond précisément chaque genre musical. La « variété française » ? Il faut que ce soit de la soupe, avec des messages simples, chantés par des femmes blanches privilégiées (le wokisme est un plus). Le R'n'B ? Il faut des mélodies narcotiques, des rythmes lourds mais simples, chantés par des femmes noires peu vêtues (l'obscénité est un plus).
Et le rap ? C'est moins linéaire, car le rap est désormais une vieille musique. Il y a aussi loin du premier album d'IAM au dernier album de Médine (quoi que ce dernier en pense) que d'un big band des années 1920 à un album de jazz électro de Miles Davis. Toutefois, pour le monde des gens bien, le rap doit absolument rester une sous-culture : un rappeur, c'est un « jeune » (issu, pléonastiquement, de la « diversité ») qui porte un survêtement, ne sait pas chanter (mais sera corrigé à l'Auto-Tune™) et parle d'un petit nombre de sujets : l'argent facile, le trafic de drogue, les grosses voitures, les filles faciles, la haine de la France et de la plupart de ses symboles. Pour ajouter une pincée de harissa, on ajoute quelques mots d'arabe et même des références à l'islam. Et hop, ça part dans les bacs, comme on disait autrefois.
Dans ces conditions, les élèves de 5e du collège Sophie-Germain de Strasbourg ont tout compris. Dans le cadre de leurs « vacances apprenantes », ils ont réalisé, avec un surveillant, un clip tourné dans leur établissement. Ils cassent des tables, se mettent en scène en reprenant les codes du rap contemporain et parlent de flingues prêts à servir et de shit à découper, sous l'œil des guetteurs. Leurs voix d'adolescents, enfantines, mal assurées, en pleine mue, rendent ce chef-d'œuvre particulièrement choquant : alors c'est ça, le collège public ? Sont-ce vraiment des « vacances apprenantes » que celles qui consistent à approuver la « culture urbaine » dans ce qu'elle a de plus caricaturalement délinquant ? Les mamans, visiblement issues de cette fameuse diversité, n'en reviennent pas. Mais bon, ça correspond à l'idée que l'on se fait du rap à gauche.
De manière assez amusante, la même semaine, le rappeur Millésime K doit se produire à Marseille. Si vous ne le connaissez pas, allez donc voir ce qu'il fait. Toujours en costume, ce jeune homme blanc, qui se tient loin (et c'est heureux) de la « culture » racaille, n'en possède pas moins un flow impressionnant, notamment sur ce qu'on appelle de la drill, pour ceux qui connaissent. Hélas ! Millésime K est patriote, il aime la France, il déteste les racailles, il connaît notre Histoire... et il le dit. Il n'en fallait pas plus pour que les écologistes marseillais demandent son interdiction - son annulation, pour reprendre le langage wokiste. Selon que vous serez...
Arnaud Florac
Source : http://bvoltaire.fr
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