Manuels scolaires : après l’apologie du migrant, l’éloge du confinement
Éducation nationale et idéologie : vaste sujet, énorme programme. Après la vague migratoire de 2015, le migrant avait envahi tous les programmes, tous les EPI [enseignements pratiques interdisciplinaires, NDLR] de l’époque Najat : anglais, histoire-géographie, français, et jusqu’à un manuel de latin présentant Énée comme un migrant. Pour la contextualisation (comme ils disent quand ça les arrange), l’esprit critique, le recul, il fallait aller chercher ailleurs qu’à l’école.
En cette rentrée, les éditeurs qui connaissent ce tropisme idéologique d’une grande partie des enseignants et du gouvernement ont de nouveau répondu à l’appel. Depuis quelques jours circule, sur les réseaux sociaux, la double page d’un manuel Belin d’Histoire-Géographie-Éducation civique de 6e intitulée Coronavirus et confinement : je comprends ce qu’est l’intérêt général. Au passage, le même manuel intitule sa première partie d’Histoire La longue histoire de l’humanité et des migrations. Idéologie cumulative. La problématique du chapitre est la suivante : « Comment certaines libertés peuvent-elles être suspendues au nom de l’intérêt général ? » Le message et l’angle sont clairs : aux nouveaux collégiens qui subissent depuis deux ans le ballet délirant des protocoles, des masques, des fermetures de classes, le collège vient cautionner le tout par son label « éducation civique ».
Plusieurs parents se sont émus de la chose. Cités par 20 Minutes, ils déplorent cette nouvelle intrusion de la propagande gouvernementale au collège : « Une maman vient de m’envoyer une photo d’un manuel d’histoire-géo paru cette année pour les [élèves de] 6e. Je trouve cela aberrant. Est-ce qu’un parent peut confirmer ? », « La propagande En Marche s’affirme ! », « Les enfants doivent s’habituer à la limitation des libertés individuelles ? Non mais franchement ! C’est scandaleux ! »
Dans sa vérification, 20 Minutes est bien obligé de constater que l’info n’est pas un fake mais tente de sauver la face de l’éditeur en l’interrogeant : « Les auteurs ont choisi l’exemple du confinement pour illustrer les notions d’intérêt général et d’intérêt particulier [et] ancrer des notions abstraites dans un cas concret qu’ont vécu les élèves de 6e », sans que “la double page ne se positionne pour ou contre le confinement”. » La réponse suffit au journal. Elle est pourtant très contestable, puisqu’aucune place n’est laissée, dans ce chapitre, aux contestations des mesures gouvernementales, ni aux conséquences négatives du confinement en termes d’apprentissages et de troubles psychosociaux sur les enfants. La vision qui en ressort est très lisse et relativement positive.
Puisque l’éditeur se justifie par la nécessité d’une mise à jour permanente (« Nous estimons – et cela est l’attente des enseignants de cette discipline d’histoire-géographie-enseignement moral et civique – qu’une mise à jour des documents, des sujets d’illustration des notions et des états statistiques doit être réalisée régulièrement »), pourquoi ne pas songer à une double page sur la responsabilité des ministres dans la gestion de la crise, les plaintes et la mise en examen d’Agnès Buzyn par les juges de la Cour de justice de la République ? C’est aussi de l’éducation civique.
Frédéric Sirgant
Source : http://bvoltaire.fr
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