La musulmane Samia Hathroubi choquée par un « mariage très blanc, très bourgeois, très chrétien »
Article de Samia Hathroubi, déléguée Europe de la Foundation for Ethnic Understanding, sur l’identité au titre très bien choisi : « Chronique d’une éternelle métèque »
« Je parle plusieurs langues, j’ai traversé une quarantaine de pays, de villes sur presque tous les continents. Mes ami-e-s sont aux quatre coins du globe, je me plais à créer une tour de Babel.
J’aimerais pouvoir me sentir proche de l’humanité et rêve de pouvoir me sentir chez moi partout. C’est tout ce vers quoi chaque geste, chaque rencontre, chaque voyage tend.
Je ne pensais pas vivre durant ma vie d’adulte ressentir subrepticement cet isolement, ce déclassement. Pourtant, ce samedi ensoleillé à Weimar (Allemagne) durant le mariage très blanc, très bourgeois, très chrétien, provoque chez moi une violence que je ne soupçonnais pas.
Depuis le début de ma vie adulte, j’ai très tôt fait le choix inconscient puis très clair, au fil des années, de créer autour de moi des bulles, des cocons pour l’individu aux identités plurielles et multiples que je suis devenue. A l’intersection des mondes occidentaux et des mondes musulmans, à l’intersection de l’ouverture et de l’enracinement, à l’intersection des traditions et des modernités, à l’intersection croisant la rive Nord et la rive Sud.
Je sais, après ces 10 années d’engagement dans les milieux interreligieux en France, en Europe, après mes séjours au Proche-Orient, que les individus comme moi ne sont pas majoritaires et que nous constituons une tribu qualifiée soit de naïve, soit de bisounours, soit d’utopistes.
Ce samedi de mariage, je ne maîtrisais pas la langue parlée. Ce samedi de mariage à Weimar, je ne me suis sentie en décalage permanent avec les invités de mon amie, et n’ai eu qu’une seule envie tout au long de cette journée de célébration : celle de m’enfuir, de m’évanouir de ce lieu auquel je n’appartenais pas. »
Source : http://fdesouche.com
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