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Le blog politique de Thomas JOLY

Pourquoi tout le monde se fout de Boko Haram… (par Nicolas Gauthier)

15 Octobre 2014, 09:48am

Publié par Thomas Joly

La machine médiatique est ainsi faite, qu’une information chasse l’autre. Le drame d’aujourd’hui sera souvent ramené, demain, à la dimension d’un simple fait divers. Et n’évoquons même pas celui d’hier, déjà périmé…

Hier, c’était justement Boko Haram, secte islamiste dont notre collaborateur Xavier Raufer tient à préciser que pour 10 % d’islamisme, il y a au bas mot 90 % de grand banditisme et une bonne dose d’animisme, qui reste tristement connue pour l’enlèvement de deux cents lycéennes nigériennes, âgées de douze à seize ans. Depuis, que sont-elles devenues ? Vendues comme esclaves ou mariées de force, croit-on savoir.

Il n’y a pas si longtemps, le gratin du show-biz se pavanait en tee-shirts arborant le slogan qui suit : « Bring Back Our Girls », « Ramenez-nous nos filles », la chose une fois traduite dans la langue de Molière. Et depuis ? Rien. Goodluck Jonathan, le président nigérian – on n’a pas, non plus, idée de porter des noms pareils –, fait ce qu’il peut. C’est-à-dire peu.

La Chine et Israël ont proposé leur aide ; ce qui est bien gentil, mais… l’ONU a qualifié l’affaire de « crimes contre l’humanité », fort bien. Goodluck Jonathan aurait même été prêt à rencontrer Abubakar Shekau, le chef historique de Boko Haram. Mais « Boko Haram, ce n’est plus un mouvement unique, c’est une multitude de cellules, même s’ils font semblant d’avoir un chef unique, le faux Shekau », nous dit Le Monde du 14 octobre dernier. Car le vrai Abubakar Shekau, chef historique de Boko Haram, serait peut-être mort. Qui croire ?

Et le même quotidien de citer ce témoignage : « Abubakar Shekau n’est pas le vrai Shekau. […] Le vrai Shekau a été blessé en 2012 et il est mort au Cameroun. Le type actuel qui gesticule et qui crie sur les vidéos des filles de Chibok [les 200 filles enlevées, NDLR], c’est un autre. Plusieurs sources, en ville, abondent dans ce sens. En quoi cela a-t-il de l’importance ? Pour l’effet psychologique. […] Boko Haram, ce n’est plus un mouvement unique, c’est une multitude de cellules, même s’ils font semblant d’avoir un chef unique, le faux Shekau. Et ces gens sont nombreux, très nombreux. »

Pour tout arranger, les grandes oreilles occidentales sont aujourd’hui braquées aux confins de l’Irak et de la Syrie. L’État islamique est désormais bien plus préoccupant qu’une bande de va-nu-pieds à la peau sombre. Ce, d’autant plus qu’en ces contrées, les guérillas à paravent religieux dissimulent le plus souvent des objectifs bien plus pragmatiques ; lorsqu’ils ne sont tout simplement pas d’ordre mafieux. Le surnom du patron d’AQMI au Mali ? « Capitaine Marlboro »… Soit le chef de bande qui sécurise trafic de cigarettes, de drogues et éventuellement d’otages…

Dans un passionnant dossier consacré au commerce de la cocaïne, Le Nouvel Observateur ne disait pas autre chose à propos des islamistes, qu’ils soient de l’EI ou du Daech : trempés jusqu’aux os dans la schnouffe. Et voilà peut-être les deux dimensions majeures que nos médias ont du mal à discerner. L’une consiste à affirmer que les autres sont des « barbares », notion somme toute relative. L’autre à surestimer le fait religieux, alors que nous n’avons, somme toute, affaire qu’à de pâles voyous.

Alors, Boko Haram, dans tout cela ? Ben… passé en pertes et profits. Ainsi va le monde. Le monde médiatique, s’entend.

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